source : https://francearchives.gouv.fr/fr/pages_histoire/39018
Sacre de Louis Le Pieux à Reims Octobre 816
Auteur du texte : Depreux, Philippe
Recueil 2016
Pages d’histoire.
Jusqu’en 2018, la Mission aux Commémorations nationales a dressé chaque année la liste des anniversaires à célébrer au nom du ministère de la Culture (cinquantenaires et centenaires). Cette liste était validée par le Haut comité des Commémorations nationales, institué par arrêté du 23 septembre 1998, qui conseillait le ministre de la Culture dans la définition des objectifs et des orientations de la politique des célébrations nationales. Vous trouverez dans cette rubrique les notices et recueils des commémorations de 1999 à 2018.
C’est un dimanche d’octobre 816 (probablement le 5 du mois) que, pour la première fois, Reims fut le théâtre d’un sacre : celui de l’empereur Louis le Pieux

C’est un dimanche d’octobre 816 (probablement le 5 du mois) que, pour la première fois, Reims fut le théâtre d’un sacre : celui de l’empereur Louis le Pieux. Ce ne fut toutefois pas le premier couronnement impérial de Louis, ni son premier sacre. Lorsqu’il devint roi d’Aquitaine en 781, à l’âge de trois ans, Louis fut sacré à Rome par le pape Hadrien Ier. En septembre 813, Charlemagne (mort le 28 janvier 814) associa son fils à l’empire selon un modèle byzantin ; le couronnement eut lieu à Aix-la-Chapelle. Le sacre de l’empereur à Reims n’avait donc pas de valeur constitutive, mais sa signification symbolique n’en était pas moindre pour autant : dans le cadre de la « renaissance » de l’empire des Francs, Louis, conscient d’être le premier membre de sa dynastie à porter le même nom que Clovis (Hludouuicus), se rendit en pèlerinage sur la tombe de saint Remi, l’évêque de Reims qui baptisa le roi mérovingien vers la fin du Ve siècle. Là, Louis le Pieux reçut le sacre des mains du pape Étienne IV. L’empereur accueillit le pontife hors les murs de la cité et l’honora en lui servant d’écuyer, se conformant ainsi aux revendications de la papauté consignées dans la fausse Donation de Constantin et reproduisant le geste de son grand-père, Pépin le Bref, lorsque ce dernier accueillit Étienne II venu le sacrer en 754 à Saint-Denis. Le pape fut logé en l’abbaye Saint-Remi, l’empereur en la cité. Quatre jours durant, ils se rendirent mutuellement visite, s’échangèrent des cadeaux diplomatiques et menèrent diverses négociations. L’apothéose eut lieu le dimanche en la cathédrale de Reims, devant l’autel de la Vierge : le pape sacra l’empereur et lui posa sur la tête une couronne qu’il avait apportée tout spécialement de Rome. De même, Ermengarde, l’épouse de Louis et mère de ses trois fi ls, fut couronnée par le pontife. Ensuite, ce dernier regagna Rome et Louis se rendit à Compiègne, où il tint une assemblée générale du royaume. La cérémonie d’octobre 816 fut loin d’établir la tradition du sacre à Reims : certains rois carolingiens de Francie occidentale de la fin du IXe et du Xe siècle y furent certes couronnés, mais ce n’est que sous les Capétiens que cet usage devint tradition. Quant à la légende de la Sainte Ampoule, elle apparaît sous la plume de l’archevêque Hincmar de Reims dans les années 860.
Philippe Depreux
professeur d’histoire médiévale à l’université de Hambourg
membre honoraire de l’Institut universitaire de France