source : https://francearchives.gouv.fr/fr/pages_histoire/39558


Avènement de Philippe V Le Long – 1316
Auteur du texte :  Gaude-Ferragu, Murielle
Recueil 2017

Pages d’histoire.
Jusqu’en 2018, la Mission aux Commémorations nationales a dressé chaque année la liste des anniversaires à célébrer au nom du ministère de la Culture (cinquantenaires et centenaires). Cette liste était validée par le Haut comité des Commémorations nationales, institué par arrêté du 23 septembre 1998, qui conseillait le ministre de la Culture dans la définition des objectifs et des orientations de la politique des célébrations nationales. Vous trouverez dans cette rubrique les notices et recueils des commémorations de 1999 à 2018.

« le royaume de France est sy noble que il ne doibt mye aller par succession a femelle ».

capture d’écran | France Archives

L’avènement de Philippe V en 1316 constitue un tournant dans l’histoire de France puisqu’il exclut pour la première fois les femmes de la Couronne. Le « miracle capétien » avait jusque-là toujours donné des héritiers mâles au royaume. La mort de Louis X provoqua une crise successorale : son épouse, Clémence de Hongrie, était alors enceinte. Le roi avait déjà une fille, Jeanne, âgée de cinq ans, de sa première femme, Marguerite de Bourgogne, princesse convaincue d’adultère. Si son inconduite, impliquant une possible illégitimité de l’enfant, fut invoquée postérieurement, ce fut l’habileté de Philippe de Poitiers qui entraîna l’éviction de la fillette du trône. En attendant la naissance de l’enfant, ce dernier prit le titre de régent. Il négocia parallèlement un accord, les Convenances (17 juillet), avec Eudes de Bourgogne, protecteur des intérêts de Jeanne. Si le nouveau-né était un garçon, il serait reconnu roi et le comte de Poitiers demeurerait régent jusqu’à sa majorité. Si Clémence mettait au monde une fille, Philippe conserverait le gouvernement du royaume jusqu’à ce que Jeanne soit âgée de douze ans. On solliciterait alors de la part des filles de Louis X une renonciation officielle au trône. C’était reconnaître implicitement le droit des femmes à la succession.

La mort du fils de Louis X, Jean Ier, le 15 novembre, cinq jours après sa naissance, précipita les choses. Le cas n’ayant pas été prévu, Philippe se proclama roi et se fit aussitôt sacrer, le 9 janvier 1317. Face à l’opposition menée par la grand-mère de Jeanne, il réunit à Paris une assemblée qui déclara que « femme ne succède pas au trône », argument repris par les chroniqueurs : selon Jean le Bel, « le royaume de France est sy noble que il ne doibt mye aller par succession a femelle ». L’exhérédation des femmes était notamment liée à leur rapport au sacré. La dignité royale avait été parée au XIIIe siècle d’un surcroît de sacralité : le roi était revêtu d’une dignité « quasi prestrale », qui ne pouvait convenir, selon les théoriciens, aux femmes. Dès l’époque carolingienne en effet, celles-ci avaient été écartées de toute fonction sacerdotale, puis du sacré en général. Elles ne pouvaient donc, en devenant « rois », être ointes d’un chrême céleste et guérir les écrouelles. La loi salique, redécouverte en 1358, vint ensuite légitimer par le droit cette dépossession de fait. Devenue loi successorale du royaume au début du XVIe siècle, on en fit l’argument décisif utilisé pour justifier l’exclusion des femmes en 1316 dans une vaste entreprise de réécriture de l’histoire. En revanche, le règne de Philippe V, très court (1316-1322), et encadré par deux temps forts de la monarchie – la royauté de Philippe IV et le changement de branche de 1328 –, ne s’imposa pas sur la scène historiographique.


Murielle Gaude-Ferragu
université Paris 13 Sorbonne-Paris-Cité
centre de recherches : Pléiade
membre junior de l’IUF
Source: Commémorations Collection 2016

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