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Site archéologique de Mystras
Mystras, la « merveille de Morée », fut bâtie en amphithéâtre autour de la forteresse élevée en 1249 par le prince d’Achaïe, Guillaume de Villehardouin. Reconquise par les Byzantins, puis occupée par les Turcs et les Vénitiens, la ville fut entièrement abandonnée en 1832. Seul demeure un ensemble saisissant de ruines médiévales dans un paysage d’une grande beauté.

Auteur : Yvon Fruneau
Copyright : © Yvon Fruneau
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Valeur universelle exceptionnelle
Brève synthèse
Mystras, la « merveille de la Morée », est située au sud-est du Péloponnèse. La ville s’est développée à flanc de colline à partir de la forteresse édifiée en 1249 par le Prince d’Achaïe, Guillaume II de Villehardouin, au sommet d’une colline de 620 mètres surplombant Sparte. En 1262, les Francs abandonnèrent le château aux Byzantins. Ce fut alors le centre de la puissance byzantine dans le sud de la Grèce, étant dans un premier temps la résidence du gouverneur militaire, puis à partir de 1348, le siège du Despotat de la Morée. En 1460, Mystras fut prise par les Turcs qui l’occupèrent un temps avant les Vénitiens. À partir de 1834, les habitants commencèrent à abandonner progressivement le site au profit de la ville moderne de Sparte ne laissant du lieu que des ruines médiévales à la beauté époustouflante au cœur d’un magnifique paysage.
Mystras, centre de la puissance byzantine, attira rapidement les habitants et les institutions, l’évêché y fut transféré de Sparte, avec sa cathédrale, la Métropole ou église de Hagios Demetrios, édifiée à partir de 1264. De nombreux monastères y furent fondés, notamment ceux du Brontochion et de Christos Zoodotes (le Christ, donneur de la vie). Sous le règne des Despotes, Mystras atteignit son apogée avec la construction d’églises, des exemples éminents d’architecture ecclésiale byzantine tardive, telles que Hagioi Theodoroi (1290-1295), la Hodegetria (env. 1310), Hagia Sophia (1350-1365), la Peribleptos (3e quart du XIVe siècle), l’Evangelistria (fin du XIVe-début du XVe siècle) et la Pantanassa (env. 1430). La ville était une pièce essentielle sur l’échiquier politique de l’époque et fut développée et embellie afin d’asseoir son rôle de centre du pouvoir et de la culture. L’histoire complexe de la ville se révèle de façon manifeste dans ses fortifications, ses palais, ses églises, ses couvents, ses maisons, ses rues et ses places publiques.
Les caractéristiques architecturales remarquables de Mystras témoignent de l’influence de l’école « helladique » d’architecture byzantine ainsi que de l’architecture de Constantinople. Les peintures dans les églises sont le reflet de la qualité et de l’éclectisme de l’art de Constantinople. Des éléments d’art roman et gothique sont également présents en raison des contacts nombreux et variés que la ville entretenait aux XIVe et XVe siècles. La beauté de ses églises, dont les murs étaient recouverts de magnifiques fresques durant la « Renaissance paléologue », la renommée de ses bibliothèques et la gloire acquise par ses écrivains, notamment le philosophe Georges Gémiste dit Pléthon et son élève l’intellectuel Bessarion, qui devint ensuite cardinal de l’Église catholique romaine et introduisit l’humanisme néoplatonicien en Italie, étayèrent la légende de la merveille de la Morée. Mystras est ainsi un exemple réellement exceptionnel de culture byzantine tardive qui a influencé le reste du monde méditerranéen et bien au delà.

Auteur : Lazaros Kolonas
Copyright : © Lazaros Kolonas
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Critère (ii) : Mystras est une cité médiévale dont l’art, né de la « Renaissance paléologue », influença le développement de l’art byzantin tardif et post-byzantin. L’influence de l’art de Mystras au cours des périodes byzantine tardive et post-byzantine peut être observée sur un grand nombre de monuments du Péloponnèse (comme à Geraki, Mani, Longanikos, Leontari, Roinos), particulièrement s’agissant de la peinture. Durant la période byzantine tardive, le rayonnement de l’art du Despotat semble avoir influencé les courants artistiques qui se sont développés dans toute le territoire grec, y compris en Crète avec l’école crétoise de peinture. Cette influence allait toujours de pair avec celle, très puissante, qu’exerçait l’art de Constantinople. Cette influence peut être facilement mise en évidence dans les travaux des peintres post-byzantins tels que Xenos Digenis, originaire du Despotat et qui exerça son art en Crète, à Étolie et en Épire, la famille Phokas en Crète, et bien d’autres artistes. L’architecture et la peinture ne sont pas les seuls éléments du patrimoine de Mystras qui a également des aspects intellectuels. D’éminents penseurs, originaires de Mystras, parmi lesquels Georges Gémiste dit Pléthon, le philosophe néoplatonicien, éveillèrent l’intérêt de l’Occident pour l’interprétation de la philosophie platonicienne et l’étude des textes grecs anciens, contribuant ainsi à la Renaissance européenne.
Critère (iii) : Mystras est un exemple unique de cité byzantine, expression d’une société urbaine florissante dans l’Empire byzantin tardif. Capitale provinciale politique et administrative de l’état byzantin, Mystras est devenue un centre intellectuel, culturel et artistique unique.
Critère (iv) : Mystras offre un exemple exceptionnel de cité fortifiée bien conservée de la période byzantine tardive, disposant d’une organisation spatiale élaborée et de fortifications avec une citadelle au sommet de la colline et deux enceintes fortifiées en contrebas. Le tissu urbain de la ville est composé de palais, de résidences et de belles demeures, d’églises et de monastères ainsi que d’édifices destinés à l’approvisionnement en eau de la cité et à son système d’égouts et à des activités commerciales et artisanales. L’architecture ecclésiale est riche de différents styles mais le « type mixte de Mystras », tel qu’on le désigne, (dans lequel une basilique à trois nefs au niveau du sol est surmontée d’une église de plan en croix, à cinq dômes, au niveau de la galerie) prédomine. Le splendide ensemble de palais, un des rares ensembles byzantins du genre ayant subsisté, les hôtels particuliers impressionnants et les résidences urbaines témoignent d’une qualité de vie exceptionnelle des habitants de la cité au cours des deux derniers siècles de l’Empire byzantin.