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Babelon Ernest. Le congrès français de la Syrie. Les travaux de la section d’archéologie et d’histoire. In: Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 63ᵉ année, N. 3, 1919. pp. 225-228.
www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1919_num_63_3_74143
Le but de ce Congrès était la nécessité d’affirmer les intérêts matériels et moraux de la France en Syrie, et par conséquent ses droits protecteurs, confirmés par le libre appel de l’immense majorité des Syriens
TEXTE INTEGRAL
COMMUNICATION
LE CONGRÈS FRANÇAIS DE LA SYRIE.
LES TRAVAUX DE LA SECTION d’ARCHÉOLOGIE ET D’HISTOIRE, PAR M. E. BABELON, MEMBRE DE L’ACADÉMIE.
On se rappelle qu’un Congrès français de la Syrie se réunit à Marseille au début de cette année (1919), sur l’initiative de la Chambre de Commerce de cette ville et avec le concours de la Chambre de Commerce de Lyon. Le but de ce Congrès qui, malgré la hâte anormale de sa convocation, eut le plus grand succès, était la nécessité d’affirmer les intérêts matériels et moraux de la France en Syrie, et par conséquent ses droits protecteurs, confirmés par le libre appel de l’immense majorité des Syriens, et de protester contre les prétentions que paraissaient afficher d’autres nations à nous ravir ces droits séculaires et traditionnels.
Ce Congrès était partagé en quatre sections, dont la Section d’archéologie, d’histoire, de géographie et d’ethnographie; j’eus l’honneur de me voir attribuer la présidence de cette dernière qui vient de publier ses Travaux (fascicule II, 252 pages in-8) : ils rentrent pour la plupart dans le domaine des études de notre Académie et ils témoignent avec éloquence du vif intérêt que les savants français n’ont jamais cessé de porter aux études syriennes dans toutes les branches de l’érudition..
Ce volume, en effet, renferme de courtes (un nombre de pages très limité était imposé à chaque auteur) mais substantielles Notices historiques et archéologiques dont il me suffira de donner les titres pour qu’on ait une idée de leur grand intérêt :
- De Gérin-Ricard, Acte de souveraineté de Charles Ier d’Anjou comme roi de Jérusalem (1284).
- Paul Durrieu, de l’Institut, Le litre de roi de Jérusalem et la France.
- Louis Bréhier, Les origines des rapports entre la France et la Syrie ; le protectorat de Charlemagne^.
- Louis Pillôt, Les premières recherches archéologiques dans la région de Mossoul: I. Les fouilles de Botta ; IL Les fouilles de Victor Place.
- Alfred Coury (de Beyrouth), Le martyre du Liban sous la domination turque.
- Eugène Duprat, Les relations de ta France et du Levant, du Ve siècle aux Croisades.
- Eugène Duprat. L abbaye de Saint-Victor et la Palestine, au temps des Croisades ( Girold, abbé de Sainte-Marie de Josaphat).
- Arnaud d’Agncl, Les relations entre VOrient et la Pro~ vence au point de vue des arts et des industries artistiques, depuis le moyen âge jusqu’au XVIIIe siècle.
- Michel Clerc, correspondant de l’Institut, Souvenirs archéologiques d’un séjour en Syrie, en 1883.
- Le P. Jalabert, L’archéologie à l’Université de Beyrouth.
- Le P. Cl. Chanteur, Les études orientales à l’Université de Beyrouth.
- Clément Huart, de l’Institut, Les frontières naturelles de la Syrie à l’époque musulmane.
- René Dussaud, Simyra et l’importance de la côte nord de la Syrie dans l’antiquité.
- Jules Baillet, Les Marseillais dans le Levant au temps des Romains.
- Frédéric Macler, Les Arméniens en Syrie et en Palestine au moyen âge.
- Paul Casanova, Damas., capitale des États musulmans.
- Victor Chapôt, La question d’Orient en Syrie dans l’antiquité et à l’heure actuelle.
- Mgr Grafïin, Note sur la « Patrologia orientalis ».
- PaulMasson, correspondant de l’Institut, Éléments d’une bibliographie française de la Syrie.
- Paul Masson, Le rôle des Français en Syrie, du XVIe au XIXe siècle.
- Murât (Louis et P.), Aperçu des ruines franques en Syrie et en Palestine.
- Tohmeh, Cartographie de la Syrie.
- Henri Froidevaux, La Société de Géographie de Paris et la Syrie, de 1822 à 1918. — Les arbres historiques de la Syrie et de la Palestine.
- E. Babelon, de l’Institut, Trois voyageurs archéologues en Syrie : le duc de Luynes, Louis De Clercq, le marquis de Vogué.
- Emmanuel dé Martontie, L’unité géographique de la Syrie.
- Les PP. Séjourné et Vincent, VÉcole d’archéologie française en Palestine.
- Gaudefroy-Demombynes, V érudition française en Syrie.
- Le P. Zumoffen, La Géologie du Liban. — Carte des intérêts français dans la Turquie d’Asie
L’espace me manque pour faire ressortir ici l’importance historique et actuelle de toutes les questions traitées au Congrès, en présence d’une assistance considérable ; mais les noms des collaborateurs que je viens de citer, bien connus chacun dans sa spécialité, sont un sûr garant du caractère scientifique des travaux présentés par eux.
Il ressort de cet ensemble varié que la France a à recueillir en Syrie et en Palestine un glorieux héritage scientifique et économique, que tout le monde peut nous envier, mais que personne n’a le droit de chercher à nous enlever. Nous serions coupables envers notre tradition française qui remonte sans interruption au moins jusqu’aux Croisades, si nous venions à le délaisser ; notre premier devoir est de faire respecter nos droits séculaires et de ne pas nous laisser, après la victoire de nos armes, ravir par d’autres ce patrimoine intellectuel et historique autant que commercial et économique, ce vaste champ ouvert à nos études et à notre expansion nationale sous toutes ses formes, dans lequel se sont illustrés bien des membres de cette Académie, comme le duc de Luynes, Renan et le marquis de Vogué, sans parler des grands voyageurs français des xvie, xviie et xviiiè siècles, ni de ceux de nos confrères qui sont encore dans nos rangs et qui m’entendent.
C’est un devoir pour moi de rappeler, en terminant cette brève notice, que le Congrès français de la Syrie a été organisé sur l’initiative personnelle du président de la Chambre de commerce de Marseille, M. Adrien Artaud, secondé par le dévoué directeur général des Services de cette Chambre, M. Henri Brenier, et par M. Paul Masson, correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques. C’est à ces trois noms surtout, MM. Artaud, Brenier et Masson, que doivent aller nos félicitations et notre reconnaissance patriotique ; tout le monde me comprendra ici si je rappelle, par une simple allusion, l’émotion qui s’empara de tous, à l’occasion de certains bruits qui tendaient à faire croire que notre situation économique et commerciale et notre protectorat moral sinon politique, en Syrie et en Palestine, allaient se trouver compromis par des arrangements diplomatiques conclus secrètement au cours des négociations pour la Paix générale qui se poursuivent présentement à Versailles.