via sfhm
La Société Française d’Histoire de la Médecine (SFHM), association reconnue d’utilité publique, fondée en 1902, a pour but :
• d’étudier et de promouvoir l’histoire de la médecine et des sciences qui s’y rattachent
• de contribuer à la sauvegarde et à la conservation des documents et témoignages du passé des sciences médicales
Elle édite des revues : Histoire des sciences médicales et e.SFHM (supplément illustré)
Emile A R O N – Professeur de Clinique médicale, Centre hospitalier Bretonneau, 37000 Tours.
Communication présentée à la séance du 23 février 1980 de la Société française d’histoire de la médecine.
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Bretonneau mourut à Passy le 18 février 1862. Le 7 mai, lors du retour de ses cendres en sa province natale qu’il avait honorée et à laquelle il était resté fidèle toute sa longue existence, la population tourangelle lui réserva de grandioses funérailles, suivant un cérémonial minutieusement réglé par Armand Trousseau, son disciple préféré. Au cimetière de Saint-Cyr-sur-Loire où il fut inhumé, Jean-Baptiste Bouillaud, Président de l’Académie de médecine, s’écria : « Pierre Bretonneau s’était acquis une si grande renommée qu’on aurait pu, comme à Boerhaave, lui écrire de la contrée la plus reculée : A Pierre Bretonneau, en Europe. »
En vérité, le « médecin de Tours » était considéré à cette époque, peut-être plus à l’étranger qu’en son pays, comme le plus éminent représentant de la pensée médicale. Mais dans notre Panthéon, cet homme d’exception, provincial, original, passionné de science, insensible aux titres et aux honneurs,, n’était pas voué pour la postérité. Dans la dernière note que nous possédons de lui, il écrit à un de ses confrères : « Accordez quelque confiance à un homme qui a mieux aimé chercher longtemps et assidûment la vérité que de se hâter de la divulguer avec fracas. »
Nous présentons à la Société française d’histoire de la médecine la biographie de ce grand médecin que nous venons de publier : Bretonneau, le médecin de Tours. Dans ce bref propos, nous n’insisterons pas sur son œuvre considérable qui permet de le considérer comme le père de la médecine contemporaine. Dans le fatras nosologique des fièvres, il a décrit la diphtérie, reliant l’angine maligne au croup ; il a individualisé, après de remarquables confrontations épidémiologiques et anatomo-cliniques, la dothinentérie(malencontreusement baptisée ensuite fièvre typhoïde par Louis) ; il a apporté à la thérapeutique une importante contribution : « Si tout ce qu’il a fait ou trouvé d’utile, soit en médecine, soit en horticulture, était écrit,la science aurait de lui de nombreux volumes », affirma son élève Velpeau en citant tous les domaines où il dirigea le flambeau de l’observation pour distinguer, suivant sa devise, « entre le fait et l’opinion ». Mais dans l’histoire de la médecine, son nom reste attaché à la doctrine de la spécificité qui fut, écrit René Dubos, « le moteur le plus puissant des progrès de la médecine au cours du siècle dernier »
Pour suivre pas à pas la vie de Bretonneau, il suffit de se conformer à l’enseignement d’Alexis de Tocqueville, client puis ami de Bretonneau, qui s’installa en Touraine en 1853, pour puiser dans les riches Archives du département d’Indre-et-Loire les éléments de son ouvrage sur L’Ancien Régime et la Révolution. L’historien ne doit pas recourir aux sources dites « narratives », mais se limiter aux informations recueillies sur des documents. La récolte est abondante pour le biographe du médecin de Tours, si on consulte les documents d’archives locales et surtout cette exceptionnelle correspondance que Bretonneau entretint avec ses élèves et ses amis. En suivant cette méthode, on chasse aisément les erreurs et les légendes colportées et on côtoie le plus possible la vérité. La biographie de nos contemporains sera délicate à établir puisqu’ils ne s’écrivent plus et correspondent par voie téléphonique. L’analyse de leurs « mémoires » éventuels sera décevante, puisqu’en règle générale, ils ne se reconnaissent ni faiblesse, ni erreur, ni échec !