Pereira Ana Leonor, Rui Pita João. Ce qu’on pensa au Portugal, au cours du temps, de la France scientifique. In: Revue d’histoire de la pharmacie, 85e année, N. 316, 1997. pp. 429-430. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pharm_0035-2349_1997_num_85_316_4899
L’affinité élective entre le Portugal et la France est visible non seulement dans les domaines religieux, idéologiques et autres, mais aussi dans le domaine scientifique. En ce qui concerne la pharmacie en particulier, nombreux furent les exemples déterminants de l’influence française : il suffit de faire référence à Lémery et à Baume, deux représentants de la pharmacie européenne des XVIIe et XVIIF siècles qui marquèrent d’une façon décisive la pharmacie portugaise. En outre, la révolution scientifique opérée par Lavoisier se fit sentir de manière significative dans la chimie portugaise : le Laboratoire chimique de l’université de Coimbra fut, d’ailleurs, un pionnier dans la diffusion des travaux du chimiste français à travers les travaux de Vicente Seabra et de Tome Rodrigues Sobral.
La préférence du Portugal pour les modèles français put également être constatée dans d’autres domaines scientifiques. On sait tous les progrès que la chimie, la physique, la physiologie, la bactériologie et la psychologie doivent à la France. Et pour attester ce fait, les noms de Lavoisier, Lamarck, Bichat, Flourens. Claude Bernard, Robin, Pasteur, Berthelot, Curie, Metchnikoff, Roux, Le Dantec, entre autres, sont invoqués.
La projection que la révolution chimique de Lavoisier eut au Portugal ne surprend pas, étant donné qu’il s’agit d’une révolution universelle. Mais on ne peut en dire de même de Lamarck, puisqu’à partir de 1859 le naturaliste anglais Charles Darwin introduisit une nouvelle théorie dans l’histoire naturelle. Or, malgré l’impact de cette théorie darwiniste, le Portugal n’hésita pas à soutenir que c’était Lamarck et non pas Darwin le « Copernic du monde organique », de même que Lavoisier était le « Copernic de la chimie ». Ainsi, le néo-lamarckisme fleurit-il au Portugal grâce à la reconnaissance de l’autorité scientifique de la France. Cette affinité est également visible dans la question de l’eugénisme qui agita les communautés scientifiques, surtout bio-médicales et juridiques de l’Europe et des États- Unis, dans la première moitié du XXe siècle. Suivant l’exemple français, le Portugal ne soutint jamais les moyens eugéniques radicaux comme la stérilisation artificielle préventive et la formation d’une élite de procréation. À l’instar du cas français, au Portugal, le problème de l’eugénisme était directement subordonné aux directives de l’hygiénisme – un sujet qui fut déjà, d’ailleurs, traité par les auteurs de cet article (A.L. Pereira, J.R. Pita, « Liturgia higienista no século XIX. Pistas para um estudo », Revista de Historia das Ideias, 15, 1993, pp. 437-559). Comme en France, au Portugal, en général, l’idéal de liberté, d’égalité et de fraternité ne céda pas face à la puissante pression de la nouvelle trilogie darwiniste-eugéniste : déterminisme, inégalité, sélection. Beaucoup d’autres raisons nous mènent à affirmer l’attraction que la France exerça sur le Portugal aussi dans le domaine scientifique. Les exemples historiques sont innombrables et nous nous en enorgueillissons.
1. Traduit du portugais par M Ana Luisa Riquito.